Les Habitants du Village l'Eau Pure

Les samurais qui ne connaissent pas Sunda Mizu Mura sont souvent désarçonnés par les manières de sa population. Un célèbre courtisan de la capitale aurait même déclaré qu’il trouvait les habitants du Village de l’Eau Pure « bien plus honnêtes et francs que les masques doucereux de la Cité des Mensonges ». Ces qualificatifs ne sont pas forcément très élogieux, mais ceux qui à Sunda Mizu Mura en ont connaissance les
prennent avec fierté. Il serait sans doute erroné de les comparer à des brutes, ou de se laisser aller aux stéréotypes concernant les manières du clan du Crabe. Les seigneurs Yasuki sont souvent capables d’un raffinement des plus remarquables, et le peuple travaille aussi dur qu’ailleurs.
Quelle que soit leur caste, les habitants de Sunda Mizu Mura font souvent preuve d’une certaine obséquiosité
purement mercantile ou intéressée. Mais les habitants de la grande cité ont leur propre code de convenances. Il est difficile de le définir avec précision mais il repose sur un mélange assez personnel d’attitudes cauteleuses ou exagérément réservées, mêlées de déclarations gouailleuses d’une surprenante franchise. Alors que la courtoisie commande normalement de faire preuve de discrétion et de demeurer serein, il n’en va pas forcément de même
à Sunda Mizu Mura. Il est par exemple de bon ton d’afficher ouvertement son scepticisme, voire de se montrer
sarcastique quand on essaye de vous tromper ou de vous intimider. Certains manient avec brio l’art difficile qui consiste à ridiculiser l’autre sans pour autant le pousser à vous sauter à la gorge, ou à vous trancher la tête.



Généralement, ces attitudes restent plutôt rares en présence de notables ou de samurai étrangers armés. Mais à l’inverse, les guerriers de la Garde Grise et de la Garde des Eaux doivent souvent user de jurons, de menaces verbales et d’ordres hurlés à pleins poumons pour obtenir la coopération des passants. Quand les représentants de l’autorité arpentent les rues populeuses de la cité, ils n’hésitent pas à distribuer généreusement coups de pied et claques sur la nuque. Les abus d’autorité et les « bavures mineures » font partie du quotidien des guerriers chargés de surveiller la métropole.


Enfin, il y a toute cette débauche à peine dissimulée. Il suffit souvent de montrer une poignée de zeni ou un beau bu d’argent pour obtenir l’attention intéressée de ses interlocuteurs heimin. Une quantité incroyable de rabatteurs parcourent les rues et n’hésitent pas à saisir la manche de kimono des passants, pour les inciter à écouter leur boniment. Ils promettent à la criée les meilleures chambres, les meilleures boissons, les meilleures distractions et souvent, avec des allusions limpides et plutôt vulgaires, des plaisirs bien plus douteux.

Dans les quartiers réservés, en particulier les établissements les plus huppés, on s’efforce de préserver un certain décorum. Et plusieurs de ces établissements n’ont pas de leçon à recevoir en matière de courtoisie ou d’art des prestigieuses maisons de thé des terres de la Grue ou du Scorpion. Mais dans les bouges moins connus ou les estaminets que l’on peut trouver un peu partout en ville, par contre…

A l’inverse, le quartier noble, ainsi que les établissements commerciaux habitués à traiter avec des samurai étrangers, ou des gens soucieux de l’étiquette, ne diffèrent guère des endroits que l’on peut trouver dans d’autres agglomérations de l’Empire.